Retour Seniors et dénutrition : mieux identifier les causes pour mieux les traiter

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Lutte contre la dénutrition : quels leviers d’actions pour les seniors et leurs aidants ?

Publié le 29 avril 2022

3 minutes de lecture

Lutte contre la dénutrition : quels leviers d’actions pour les seniors et leurs aidants ?

2 millions de français sont touchés par la dénutrition. Elle peut toucher tout le monde, sans distinction. Découvrez les causes et les conséquences de la dénutrition des seniors, avec le professeur Eric Fontaine.

 

« Après 60 ans, il ne faut pas avoir peur de manger gras ! »

Le Professeur Éric Fontaine, fondateur du Collectif de lutte contre la dénutrition et médecin responsable de l’Unité de nutrition artificielle du CHU de Grenoble, revient pour O2 sur les causes et conséquences de la dénutrition des seniors. Il nous livre ses conseils.

 

Comment définit-on la dénutrition ? À partir de quand parle-t-on de dénutrition chez une personne âgée, et comment la décèle-t-on ?

Concernant la dénutrition, tous les êtres humains sont logés à la même enseigne. Il n’existe pas de particularité propre au grand âge. On parle de dénutrition lorsque l’on dépense plus d’énergie que l’on en consomme. En d’autres termes, on puise dans ses réserves et l’on maigrit. Le corps humain dispose alors de deux types de « réserves » : la graisse et le muscle.

Si perdre de la graisse est sans gravité, en revanche perdre du muscle est problématique, surtout lorsque l’on est âgé. En effet, cela favorise les chutes, et donc la perte d’autonomie, et entraîne une diminution des défenses immunitaires, et donc des infections graves. Pour éviter d’en arriver là, la solution la plus simple est de se peser régulièrement. On considère qu’une personne est dénutrie lorsqu’elle a perdu 5 % de son poids en un mois, ou 10 % en six mois. Pour quelqu’un qui pèse par exemple 60 kilos, perdre 5 % de son poids équivaut à 3 kilos. Cela ne saute donc pas aux yeux ! Raison pour laquelle il faut adopter le réflexe de la pesée. Les plus courageux calculeront l’Indice de masse corporelle (IMC), en divisant le poids en kilos par la taille en mètres, puis en redivisant le résultat obtenu par la taille à nouveau. Au-dessus de 70 ans, l’IMC doit être supérieur à 22.

En dehors de la pesée, il faut être attentif aux vêtements qui deviennent amples, aux bagues qui glissent des doigts… tous ces signes doivent alerter le senior ou son aidant. Il faut alors rapidement consulter un médecin.

« On considère qu’une personne est dénutrie lorsqu’elle a perdu 5% de son poids en un mois, ou 10% en six mois. »

 

Quelles sont les principales causes de la dénutrition ?

Si l’on remonte dans le temps, les principales causes de la dénutrition étaient socio-économiques : les gens mouraient de faim car ils n’avaient pas assez à manger. Aujourd’hui, les causes sont différentes, et plurielles.

Tout d’abord, avec les progrès de la médecine en matière de prise en charge de maladies chroniques (cancers, troubles de la déglutition, maladies inflammatoires, etc.), la dénutrition touche progressivement des patients qui auparavant avaient une faible espérance de survie. En d’autres termes, nous vivons plus longtemps malades, et la dénutrition est l’une des conséquences de ces maladies.

La perte d’appétit peut également s’installer progressivement à cause d’une douleur dans la bouche, un dentier qui fait mal par exemple. Et elle peut aussi survenir brutalement ! Après un choc psychologique, un décès dans son entourage par exemple, qui cause une souffrance psychologique…

Pour résumer, de nos jours les gens ne meurent plus parce qu’ils n’ont pas assez à manger, ils meurent parce qu’ils n’ont plus assez faim.

 

Comment ce sujet est-il abordé de manière générale en France, qu’en est-il de la prévention ? De sa prise en charge ?

Aujourd’hui, environ deux millions de personnes sont dénutries dans notre pays. C’est un sujet qui est peu connu, ce qui complique la prise en charge. C’est la raison pour laquelle le Collectif de lutte contre la dénutrition a été créé ; pour alerter les pouvoirs publics.

La première étape de la prise en charge est l’information, l’alerte. Pour informer les gens que cela peut leur arriver, il faut les sensibiliser sur les causes possibles du mal.

La deuxième étape est celle de la déconstruction des idées reçues, et de la rééducation des personnes âgées à une alimentation qui correspond à leurs besoins. On nous répète toute la journée qu’« il ne faut pas manger trop gras, trop salé, trop sucré ». Cette consigne ne s’adresse pas aux seniors ! On ne fait pas de régime à 70 ans ! Dans la mesure où l’on mange moins, il faut au contraire prioriser les calories et les protéines.

Enfin, en cas de dénutrition avérée, il y a deux prises en charge possibles : la prise de compléments alimentaires oraux, que l’on trouve en pharmacie ou, dans les cas les plus sévères, la nutrition artificielle. En résumé, il est important de comprendre qu’il n’est pas normal de maigrir lorsque l’on est en bonne santé. Et attendre en se disant « cela va passer, je reprendrai mes kilos plus tard » n’est pas une solution. C’est beaucoup plus difficile de reprendre dix kilos que d’en reprendre trois ! Il ne faut jamais banaliser un amaigrissement. Le poids d’un adulte doit être stable !

 

Avez-vous des conseils de surveillance en termes de dénutrition des seniors à partager à ces derniers ou aux aidants qui les accompagnent ?

Que l’on soit soi-même senior ou que l’on s’occupe au quotidien d’une personne âgée, à domicile ou en Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), il faut être vigilant sur le jeûne nocturne. En effet, quand on est jeune et en bonne santé, on peut facilement ne pas manger entre 19 h le soir et 9 h le lendemain matin, sans conséquence. Mais lorsque l’on est plus âgé, jeûner pendant plus de douze heures revient à puiser dans ses réserves. Surtout que bon nombre de personnes, en vieillissant, préfèrent manger léger le soir. La solution est donc de dîner plus tard, ou bien de se lever plus tôt le matin.

De manière générale, il ne faut pas avoir peur de manger gras, ni de grossir, au contraire – sauf en cas d’obésité massive évidemment. Je recommande également de conserver une activité physique. C’est une autre interprétation du slogan « manger, bouger » que l’on connaît. Il vaut mieux manger peu, mais riche, et bouger pour garder un bon volume musculaire.

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